Animal ou presque, quasiment oiseau, séquence mythologique qui dit la renaissance. Brûlé qui renait de ses cendres. Souvent représenté comme un Mytho à plumes sous les traits d’aigle ou autre oiseau monstre, dragon, baroque, agressif ou plus exactement en haut de l’échelle des prédateurs (comme l’homme).
Pour mon « Phénix », le premier brouillon de mes réflexions me porte plutôt vers un fou.
Fou du roi, Fou de l’échiquier. Créateur-pion, pion de collège. Fou comme un oiseau, un Artaud. Fou qui vole et plonge, pêche et harponne comme nul autre emplumé. Pique une tête toutes voiles pliées pour percer le miroir d’eau et la surface des choses. Fou qui dit au roi la folie des hommes « raisonnables ».
D’abord, je pense au fou de Bassan que j’ai visité sur l’archipel des Sept-Iles en face de Ploumanach. Sur Rouzic, leur falaise de nidification. Impressionnante masse blanche (environ 17 000 couples + les célibataires) de fientes, ambiance très agitée, très sonore ... d’apparence très brouillonne.
Et puis d’ile en ile, d’un être à la dérive, je tombe par hasard, ou pas, sur les Galápagos et son fou à pied bleus.
Sa danse de séduction - que d’aucuns trouveront ridicule - me donne des frissons. « Regarde mes pieds, comme ils sont plus bleus que ceux de mon voisin » (dit-il à la promise qui brille de toutes ses plumes). Voilà le phénix que je veux dans ma tête, sur mon palette-radeau. Sur une toile qui baigne dans mes couleurs d’huile précieuses. Vrai, simple - ridicule pour qui ne voit pas - majestueux à mes yeux. Dans ce bleu du pied, une magie qui comme toute vraie magie, doit se cacher. Ailes pliées, cachées, en attente. L’attente du miroir, de l’eau, d’un plongeon, du poisson, du repas, d’une faim qu’on satisfait, d’un désir encore insatisfait.